“THE OLD WORLD IS DYING, AND THE NEW WORLD STRUGGLES TO BE BORN : NOW IS THE TIME OF MONSTERS.”
― ANTONIO GRAMSCI
Il paraît que le printemps a eu lieu.
Moi je ne l'ai pas vu venir.
Il est fini le temps des cerises. Maintenant c'est le temps de la déconfiture. Et comme elle est amère. Arrosée de vin tous les soirs. Pendant le confinement nous avons tous bu, beaucoup, de ce mauvais vin qui fait oublier.
L'ivresse est passée. Maintenant reste la rage. Je fixe mon mécontentement sur une chose qui me paraît toujours déplacée.
Je cherche un droit à ma colère comme si elle avait besoin d'un tuteur. Pourtant elle se tient droite, seule.
Je suis debout dans la foule, devant l'entièreté du monde. Je consomme le silence qui s'installe autour des choses. Autour des tables, des repas de famille, autour des yeux malaisés qui forment des regards, autours des carrés noirs qui se découpent et se reproduisent.
C'est toujours pareil. Cette histoire est fatiguée, elle ne se raconte plus. On ne raconte plus ça, la légende du jeune noir qui n'arrive pas à vivre. Il est sur le seuil, dans l'état limitrophe à la normalité.
Franchir le seuil est inconcevable - rester sur le seuil l'est plus encore. La..e jeune noir..e préfère mourir. D'ailleurs il mourra.
On donnera à son sang des significations diverses. On donnera à son écoulement une explication. On aura toujours à dire sur la blessure, la nature de la blessure, la profondeur de la blessure. Plus rarement on s'interrogera sur son origine. Plus rarement on se demandera pourquoi la blessure est mortelle.
Pour qui ne voit pas les couleurs, difficile de savoir pourquoi la..e jeune noir..e saigne. Peu importe au fond à qui profite le drame ou les formes qu'il prend. Peu importent ceux qui intellectualisent leur gêne immense ou recherchent sa source.
Il faut saisir le silence et le déchirer des deux mains. Il faut lui imposer le bruit. Seul..es, impuissant..es face au désastre, on a plus envie de l'être. Seul..es, on veut devenir nous.
Nous trouverons comment déplacer le vide et lui donner une vibration. Tout ce que nous pourrons pour dépasser la puissance du monde et pour détruire la surface du monstre.
Nous errerons encore. Nous errerons dans la rage, qui doit se faire patiente, qui doit s'aiguiser. Nous errerons dans l'attente d'un phénomène. Il ne faut plus l'espérer mais lui donner naissance.
Nous le baptiserons ensemble.
texte : GATA
visuel : ELOI
― ANTONIO GRAMSCI
Il paraît que le printemps a eu lieu.
Moi je ne l'ai pas vu venir.
Il est fini le temps des cerises. Maintenant c'est le temps de la déconfiture. Et comme elle est amère. Arrosée de vin tous les soirs. Pendant le confinement nous avons tous bu, beaucoup, de ce mauvais vin qui fait oublier.
L'ivresse est passée. Maintenant reste la rage. Je fixe mon mécontentement sur une chose qui me paraît toujours déplacée.
Je cherche un droit à ma colère comme si elle avait besoin d'un tuteur. Pourtant elle se tient droite, seule.
Je suis debout dans la foule, devant l'entièreté du monde. Je consomme le silence qui s'installe autour des choses. Autour des tables, des repas de famille, autour des yeux malaisés qui forment des regards, autours des carrés noirs qui se découpent et se reproduisent.
C'est toujours pareil. Cette histoire est fatiguée, elle ne se raconte plus. On ne raconte plus ça, la légende du jeune noir qui n'arrive pas à vivre. Il est sur le seuil, dans l'état limitrophe à la normalité.
Franchir le seuil est inconcevable - rester sur le seuil l'est plus encore. La..e jeune noir..e préfère mourir. D'ailleurs il mourra.
On donnera à son sang des significations diverses. On donnera à son écoulement une explication. On aura toujours à dire sur la blessure, la nature de la blessure, la profondeur de la blessure. Plus rarement on s'interrogera sur son origine. Plus rarement on se demandera pourquoi la blessure est mortelle.
Pour qui ne voit pas les couleurs, difficile de savoir pourquoi la..e jeune noir..e saigne. Peu importe au fond à qui profite le drame ou les formes qu'il prend. Peu importent ceux qui intellectualisent leur gêne immense ou recherchent sa source.
Il faut saisir le silence et le déchirer des deux mains. Il faut lui imposer le bruit. Seul..es, impuissant..es face au désastre, on a plus envie de l'être. Seul..es, on veut devenir nous.
Nous trouverons comment déplacer le vide et lui donner une vibration. Tout ce que nous pourrons pour dépasser la puissance du monde et pour détruire la surface du monstre.
Nous errerons encore. Nous errerons dans la rage, qui doit se faire patiente, qui doit s'aiguiser. Nous errerons dans l'attente d'un phénomène. Il ne faut plus l'espérer mais lui donner naissance.
Nous le baptiserons ensemble.
texte : GATA
visuel : ELOI