J’ai une belle collection de chemises.
Elles sont rangées par couleur. J’essaye de m’habiller correctement, mais au fond, je sens bien que ce n’est pas la question, et que personne n’est dupe.
Je n’ai pas l’aisance de cellui qui porte la chemise comme il porte son métier.
L’aisance de cellui qui sait où est sa vie, même si elle est dans un bureau éclairé au néon, et la main moite posée sur une souris.
Je n’ai pas non plus l’aisance de cellui qui est débordé..e par son travail et qui mange son taboulé en barquette devant son double écran.
Et cette manière courtoise, nonchalante et tellement naturelle d’envoyer du small talk amical et distant à la fois le matin, je dois dire qu’elle me fascine.
Moi, je n’y arrive pas.
Chaque geste, jusqu’à appuyer sur le bouton de la Nespresso, est un calvaire.
D’abord, je réfléchis à quelle tasse prendre. Je choisis toujours la moins moche. En général, j’opte pour la sobriété.
Ensuite, j’essaye de prendre l’air le plus naturel possible.
De regarder autour de moi sans avoir l’air dans la lune, comme déjà absorbé..e par les enjeux de ma journée, tout en ayant l’air sympa.
Ensuite, je pense à ces 5 capsules en aluminium qui s’ajoutent par ma faute à l’océan de merde dans lequel tout le monde semble content d’exister ; tout ca pour accomplir un travail monstrueux dont l’utilité est limitée.
Après avoir ajusté ma chemise dans mon pantalon, je prends place devant mes deux écrans, à force d’une excitation artificielle. Quand je me mets à scroller Linkedin, je me demande comment autant de gens ont pu choisir cette vie.
Je flotte le regard fixe parce que j’ai choisi une vie ou le doute et l’hésitation, la contemplation et le rêve n’ont pas leur place.
Au mois d’août, il ne reste plus grand monde quand je descends dans la rue le matin, mis à part les mecs qui lavent les vitres de Chanel devant mon bureau.
Le midi, des dizaines de livreurs Deliveroo au scooter scotché attendent en plein cagnard devant les 3 restaurants de la rue.
Je me demande à quoi ils pensent.
texte : EUTPPP
visuel : ELOI
Elles sont rangées par couleur. J’essaye de m’habiller correctement, mais au fond, je sens bien que ce n’est pas la question, et que personne n’est dupe.
Je n’ai pas l’aisance de cellui qui porte la chemise comme il porte son métier.
L’aisance de cellui qui sait où est sa vie, même si elle est dans un bureau éclairé au néon, et la main moite posée sur une souris.
Je n’ai pas non plus l’aisance de cellui qui est débordé..e par son travail et qui mange son taboulé en barquette devant son double écran.
Et cette manière courtoise, nonchalante et tellement naturelle d’envoyer du small talk amical et distant à la fois le matin, je dois dire qu’elle me fascine.
Moi, je n’y arrive pas.
Chaque geste, jusqu’à appuyer sur le bouton de la Nespresso, est un calvaire.
D’abord, je réfléchis à quelle tasse prendre. Je choisis toujours la moins moche. En général, j’opte pour la sobriété.
Ensuite, j’essaye de prendre l’air le plus naturel possible.
De regarder autour de moi sans avoir l’air dans la lune, comme déjà absorbé..e par les enjeux de ma journée, tout en ayant l’air sympa.
Ensuite, je pense à ces 5 capsules en aluminium qui s’ajoutent par ma faute à l’océan de merde dans lequel tout le monde semble content d’exister ; tout ca pour accomplir un travail monstrueux dont l’utilité est limitée.
Après avoir ajusté ma chemise dans mon pantalon, je prends place devant mes deux écrans, à force d’une excitation artificielle. Quand je me mets à scroller Linkedin, je me demande comment autant de gens ont pu choisir cette vie.
Je flotte le regard fixe parce que j’ai choisi une vie ou le doute et l’hésitation, la contemplation et le rêve n’ont pas leur place.
Au mois d’août, il ne reste plus grand monde quand je descends dans la rue le matin, mis à part les mecs qui lavent les vitres de Chanel devant mon bureau.
Le midi, des dizaines de livreurs Deliveroo au scooter scotché attendent en plein cagnard devant les 3 restaurants de la rue.
Je me demande à quoi ils pensent.
texte : EUTPPP
visuel : ELOI